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Escapade en MoldavieVoyage dans le temps en Bessarabie

29 septembre 2015by admin
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Notre agence de tourisme « Voyages Pourquoi Pas » a vécu une expérience peu commune que nous voulons partager avec vous aujourd’hui.

Depuis plus d’un an, nous faisons tout pour promouvoir la culture, la cuisine, les paysages, l’artisanat et l’hospitalité moldave. C’est évidemment un défi. La Moldavie n’est pas aussi célèbre dans le monde que Las Vegas, Moscou ou Venise. Pour autant, nous arrivons de mieux en mieux à faire connaître les charmes de ce morceau de terre logé entre la Roumanie et l’Ukraine. Nous croyons dur comme fer dans l’idée que venir en Moldavie… c’est quelque part se plonger dans un univers surprenant… entre le monde latin et le monde slave. Une expérience unique à vivre au moins une fois.

Il y a quelque temps nous avons reçu une demande pour le moins inédite. Il ne s’agissait pas de faire un circuit touristique classique en Moldavie mais de retourner sur les traces de quelqu’un… un homme… un homme qui s’appelait Israël Neiman et qui naquit, il y a plus d’un siècle, le 31 août 1901 dans la ville moldave de Bender. Un retour dans le passé.
L’auteur de cette demande était son fils, Marcel Neiman, citoyen français et parisien dans l’âme. Il avait voyagé un peu partout sur le globe mais n’avait jamais mis les pieds en Moldavie, il était temps pour lui de retrouver une part de son identité. Son père avait en effet quitté définitivement la Moldavie pour émigrer en 1920 à Paris. Il s’installa dans le quartier de Montmartre, rencontra sa femme Ida et fonda une famille. Marcel naquit en 1931 de cette union. Comme il me dira plus tard lors de sa venue à Chisinau :

Bien que je ne connaisse pas la langue russe… je me souviens très bien des sonorités de cette langue merveilleuse. Cela remonte à l’enfance… Et la musique russe, elle, m’a toujours provoqué une émotion profonde, inexplicable, dans les gênes.

L’histoire que vous allez lire est aussi dramatique qu’émouvante. Belle et triste. Les mots sont difficiles à choisir. Elle traverse une époque complexe et tourmentée.. La crise économique des années 20, le Royaume de Roumanie, l’Empire Russe, la Révolution bolchevique, la vie de bohème à Paris.. Puis celle effroyable, redoutable, meurtrière de la Seconde guerre mondiale, du gouvernement de Vichy, de ses millions d’êtres humains qui perdirent la vie dans l’implacable violence de la machine nazie. Elle mélange devoir de mémoire et souvenirs douloureux.

ISRAËL NEIMAN, DE LA RÉVOLUTION BOLCHEVIQUE À LA BOHÈME PARISIENNE

Cet homme venait d’une ville située à 2500km de Paris. Israël Neiman était de Bender en Bessarabie (ancien nom de la Moldavie).
De confession juive et de langue maternelle russe, on sait peu de choses sur sa jeunesse. Il n’y avait pas Facebook, il n’y avait pas les blogs. On en sait par contre un peu plus sur sa ville, sur l’ambiance dans laquelle il devait vivre et sur ce qui le poussa à partir pour la France.

Rapide tour d’horizon.

Bender étant devenu roumain depuis 1918, tous ses habitants devinrent sujets du Royaume de Roumanie. Quelle nationalité avaient t’ils avant ? Ils étaient russes. Les empires se dévoraient au gré des batailles et des traités. Les temps n’étaient pas à la fête.
La ville de Bender fut le théâtre dans ces années là d’une grave crise économique et surtout d’agitations révolutionnaires majeures. On assistait à la révolution de Lénine. La révolution d’Octobre ! L’Empire russe tombait dans la dictature du prolétariat. Le communisme devait bientôt triompher et l’URSS s’installer pour 68 ans.

Alors qu’en Ukraine voisine la chasse aux « russes blancs » dégénérait en guerre civile, la ville de Bender était devenue en quelque sorte un refuge pour tous les opposants à la révolution bolchevique. Des milliers de dissidents cherchaient à traverser au péril de leur vie le fleuve Dniestr en pleine nuit pour arriver à Bender. Les gardes soviétiques n’hésitant pas un instant à canarder quiconque tenterait de s’enfuir. La ville était devenue la porte d’entrée du Royaume de Roumanie, devenue dans ces circonstances troubles, une véritable tête-de-pont de la lutte contre l’expansion communiste dans la région.
Rôle peu connu, la France se mêla également à l’affaire ! Les manuels d’histoire n’en parlent quasiment pas mais nous avons joué un rôle en Moldavie. Le jour de Pâques 1919, le pont de la ville sur le fleuve Dniestr fut littéralement détruit à l’explosif par l’armée française (qui était venue prêter main forte à l’armée roumaine) afin de repousser les assauts bolcheviques venant de l’autre coté de la rive. Telle était la situation politique de ce petit coin d’Europe de l’Est. Les choses étaient loin d’être calme.

Au milieu de ce déchainement de violences, la communauté juive de la ville dont faisait parti Israël Neiman était profondément inquiète. On entendait des histoires horribles. Des pogroms d’une rare intensité éclataient en Ukraine, l’antisémitisme explosait. On accusait ainsi les Israelites d’être de mèche avec les bolcheviques, d’être responsable de la guerre, d’être la cause de tous les malheurs de la région. L’éternelle rengaine.
Les juifs de la ville voyaient monter cette vague violente de judéophobie et cherchaient donc un moyen de fuir en Europe de l’Ouest ou en Amérique. Partir loin pour se sentir enfin libre. Partir loin pour avoir un avenir. C’est certainement dans cet état d’esprit qu’Israël Neiman décida de partir en France un jour de 1920, en passant par l’Italie. Plus de 2500km de voyage pour se retrouver à Montmartre et y poser définitivement ses valises. Il avait 19 ans. Et une nouvelle vie commença.

Au fil des années, Israël qui se fait désormais appeler Henri par souci d’intégration, se construit peu à peu une place dans le Paris bohème. Il trouve un travail, un appartement. Son français devient impeccable. Il rencontre l’amour de sa vie en la personne d’Ida Chouvalsky, une jeune française d’origine biélorusse qu’il s’empresse d’épouser. Il devient père en 1931. Marcel est né. A la radio, l’artiste Georges Milton pousse la chansonnette : « C’est papa, c’est parisien ». La France est insouciante.

MATRICULE 46302 À AUSCHWITZ
La dernière lettre d’Israël Neiman à sa famille

La destinée d’Israël Neiman sera la même que six millions de juifs en Europe pendant la seconde guerre mondiale. La mort.
« Nous sommes dans le train et partons pour une destination inconnue » écrira t’il le 6 juillet 1942 dans une dernière lettre jetée sur la voie ferré comme une bouteille à la mer. Le train part pour le camp d’extermination d’Auschwitz Birkenau en Pologne. Il n’en reviendra pas. Son corps disparu à jamais dans les fours crématoires nazis. Comment a t’il été arrêté et par qui ? Une lettre anonyme. Une dénonciation avec un contenu inconnu. En avril 1942, des gendarmes français emportent avec eux Israël Neiman. Cela fait 20 ans qu’il vit et travaille en France. C’est un juif étranger, roumain. Il a demandé sa naturalisation, en vain. Il s’est engagé comme volontaire dans l’armée française pendant la bataille de France en 1940, en vain. Les autorités de Vichy ont décidé de le livrer aux allemands.

Ida sa femme et son fils Marcel survivront à la guerre. Ils ne seront jamais arrêtés. Peut être car ils ont la nationalité française ? Nous ne le saurons jamais. La libération en 1944 mettra un terme aux rafles et aux déportations.
Le petit Marcel passera toute sa scolarité avec l’étoile jaune et retiendra dans cet océan de malheurs la bonté de son instituteur. Un homme qui dans sa mémoire a continué à faire son travail de professeur sans jamais faire attention à cette maudite étoile en tissu, sans jamais marcher dans la logique mortifère de la discrimination et qui n’a jamais hésité à donner des cours de soutien scolaire à l’enfant.

Ida, elle, ne s’en remettra jamais. Les nazis lui ont enlevé son mari, sa mère et sa sœur.« On ne peut pas vivre quelque chose de pire» me confie Marcel en évoquant l’insondable peine vécue par sa mère.

RETOUR AUX SOURCES EN 2015
Dans la rue Moscou à Bender. La rue ou vivait Israel Neiman il y a 100 ans

C’est pour retrouver cette ville perdue dans les tréfonds de la mémoire familiale que Marcel Neiman nous a contacté en avril 2015 pour programmer un voyage en Moldavie…. Et retrouver « Bender ». La ville d’origine de ce père assassiné alors que Marcel n’avait que 11 ans.
C’est ainsi que le 16 septembre 2015, Marcel Neiman et sa femme Solange sont arrivés à l’aéroport de Chisinau. Presque 100 ans après qu’Israël Neiman soit parti pour la ville lumière.

Marcel a pris soin d’apporter avec lui quelques photos anciennes et le passeport de son père. Le papier est jauni mais les feuilles tiennent. Il tourne chaque page avec beaucoup de précautions. Il me montre un visa pour le Canada et m’explique que son père voulait initialement partir là bas avant qu’il ne décide finalement de rester à Paris. On pense à Gustave Flaubert qui écrivait que « ne plus aimer Paris était un signe de décadence ». Visiblement Israël Neiman était tombé sous le charme de cette ville d’accueil.

Sur une autre page, une information importante, l’adresse de son père à Bender. 43 rue Regele Ferdinand. L’objectif de ce voyage en Moldavie.

Pendant 4 jours, Marcel et Solange verront la Moldavie d’aujourd’hui. Ils gouteront à la cuisine locale et visiteront les époustouflantes caves à vin de Cricova. Ils visiteront le magnifique monastère orthodoxe de Curchi. Ils arpenteront les rues de Chisinau. Ils rencontreront l’ambassadeur de France en Moldavie, Mr Pascal Vagogne, qui les recevra dans son bureau pour écouter avec intérêt la terrible histoire d’Israël Neiman. Une attention que le couple appréciera tout particulièrement. Et ils verront enfin…. Bender.

Bender a une situation très particulière aujourd’hui. Cette ville de 90 000 habitants est située à 60km de Chisinau sur un territoire séparatiste pro-russe en Moldavie : la Transnistrie. Un petit Etat non reconnu par la communauté internationale, indépendant de facto depuis 1991 et protégé militairement par la Russie. Vous avez dit compliqué ?
Bender n’est ni totalement moldave, ni totalement russe. La Transnistrie cultive l’héritage de l’Union Soviétique mais sans le communisme qui va avec. La géopolitique est passée par là avec toutes ses contradictions.
Néanmoins, le passage de la frontière, bien que tendu, ne pose aucun problème. Nous arrivons à Bender. La rue inscrite sur le passeport a bien entendu changé de nom mais existe toujours…. La rue du roi Ferdinand étant devenue la rue Moscou. L’URSS est passée par là.

Avec l’ambassadeur de France en Moldavie

La rue est calme. Le temps ensoleillé. Certaines maisons sont anciennes. Un immeuble résidentiel datant de l’époque Brejnev nous fait de l’ombre. A gauche une ancienne synagogue transformée en académie de boxe. Un peu plus loin un supermarché. En 1920, Israël Neiman quittait définitivement cette allée pour la patrie de Rousseau et Voltaire. Cette même patrie qui se transforma en suppléante du diable pendant 4 longues années.

Je demande à Marcel ce qu’il ressent en foulant enfin la terre qui vit pousser la jeunesse de son père. “Pas grand chose” me répond t’il avec une indifférence touchante. Je ne le crois pas un instant.

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